La présence. Témoignage, par Marion Curtillet.

Le vide ?

Pendant sa première année, Piwi Cœur n’avait aucun moyen d’agir sur le monde autour de lui, d’y manifester sa présence. Prenons la faim par exemple. Un bébé qui a faim, il pleure, n’est-ce pas ? Ce faisant, il attire votre attention, et vous pouvez satisfaire son besoin. Pour Piwi Cœur, en guise de pleurs, nous avions des alarmes sur le téléphone : « C’est l’heure de brancher Piwi Cœur à sa pompe d’alimentation ! »
Alors oui, il était présent, bien sûr ! Très présent même. Par les soins constants que réclamait son corps, par les alarmes des machines, par l’angoisse permanente dont son état de santé nous remplissait… Un peu comme si nous avions, l’entourage, les professionnels, comblé le trou béant de son absence d’interaction par tous les moyens disponibles. La peur du vide. Le besoin qu’à la place de rien, il y ait quelque chose…

Aujourd’hui, avec le recul, avec les machines qui occupent de moins en moins de place et Piwi Cœur de plus en plus, je prends conscience qu’il y a toujours eu quelque chose. Une présence. Constante. Imperceptible tant que mes sens, ma logique, mes émotions, occupaient tout l’espace. Mais toujours là. Attendant mon propre silence pour se faire entendre.
L’intérieur de Piwi Cœur a toujours été rempli. Rempli d’une onde qui entre en résonnance avec l’intérieur de moi. Depuis le premier jour. Depuis bien avant sa naissance. Rempli de l’Amour. Rempli de la Vie.

Les enfants, champions du remplissage !

Pour l’entourage adulte de Piwi Cœur, susciter chez lui des réactions est un sujet sérieux. Un travail. Quelque chose de pensé. Des spécialistes, des livres, des méthodes. Des exercices, des analyses de résultats. Une cause, une conséquence. Vous savez ce que c’est qu’un adulte, n’est-ce pas ?

Les enfants, c’est pas pareil ! Les frères et sœurs de Piwi Cœur ne se sont jamais demandé s’il réagissait à leurs stimuli ou pas. Dès le départ, ils ont joué avec lui, comme si de rien n’était ! En tant que parents, nous avons eu de belles frayeurs. Mais enfin, nous avons réussi à laisser faire. C’est parce qu’il l’ont tellement embêté, qu’il a appris à râler. Parce qu’ils lui ont fait vivre des sensations si fortes, qu’il a appris à réclamer « encore ».

Oh là là…

Aujourd’hui, avec le recul, si nous devions à notre tour apporter notre pierre aux réflexions des adultes sur le sujet des interactions, nous dirions : « De temps en temps, entourez le bébé d’enfants, et quittez la pièce » !

Le super pouvoir

Avec tout ça (« tout ça » = l’évolution normale de la maladie + les professionnels + l’hormone de croissance + les frères et sœurs + la chance + tant d’autres choses encore), Piwi Cœur a acquis au cours de sa deuxième année les moyens d’agir sur le monde autour de lui et d’y manifester sa présence. Il construit sa place dans le flux, devient ce point unique qui reçoit, intègre, émet, transmet, des informations, des émotions, des ondes. Il agit et réagit. Fait agir et réagir.

Dans l’album, nous avons appelé cela son « super pouvoir ». Oui. Car après avoir traversé le grand vide, une capacité aussi banale que « émettre un signal » nous semble encore plus extraordinaire que se transformer en gros monstre vert, ou passer d’immeuble en immeuble en jetant des toiles d’araignées !

Le super pouvoir

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