L’ascenseur émotionnel. Eclairage. Par Myriam Titos, psychologue clinicienne à l’hôpital Necker- Enfants malades.

Photo : Myriam Titos

« En réanimation, personne ne peut prétendre savoir ce qui va se passer… »

Peu de gens s’imaginent ce que peut être un séjour en réanimation avant d’y avoir été confronté. La réanimation n’est pas un lieu de soin comme les autres. C’est un lieu fermé où le temps comme la vie sont suspendus au rythme des machines dans un climat d’incertitude.

Lorsque l’enfant est en réanimation, cette incertitude est dévastatrice pour les parents. Ils auront peu de moyens d’être rassurés alors qu’ils en éprouvent immodérément le besoin et seront souvent frustrés de l’impossibilité des soignants à leur donner des réponses optimistes quant à l’évolution de l’état de santé de leur enfant. En réanimation, personne ne peut prétendre savoir ce qui va se passer.

Bien sûr, il y a les statistiques, celles-là  mêmes qui ont permis d’accepter la pathologie, d’anticiper le parcours médical et d’envisager l’opération. Les parents vont donc se raccrocher comme ils peuvent au pronostic qui leur a été donné lors de l’annonce et, selon l’instant vécu en réanimation, selon les paroles des professionnels et les interprétations qu’ils en feront, la balance imaginaire penchera du côté positif ou du côté négatif, ouvrant ou fermant alternativement tout espoir en dehors de toute pensée raisonnable.

Photos : Les aventures de Piwi Cœur

« Ascenseur émotionnel »,  « montagnes russes » : mélange de haut et de bas que chacun va vivre de façon singulière avec l’impression, souvent juste, de ne pas pouvoir être compris par son compagnon ou sa compagne, ses proches ou les autres parents rencontrés sur place. Pour certains,  il y aura nécessité alors de se construire une bulle afin de ne pas se laisser parasiter par des paroles alarmistes ou faussement rassurantes. Une bulle qui permettra  aussi  de s’accrocher à l’avenir en imaginant le meilleur pour son enfant lorsque le pire est envahissant. Pour d’autres, ce sera le besoin de se tourner vers le monde extérieur pour combler le vide créé par l’incertitude et tenter d’y chercher du réconfort, un soutien spirituel ou une explication rationnelle.
Il n’y a pas une seule façon de vivre ce moment, chacun trouvera sa solution pour affronter le flot des émotions contradictoires.

« En tant que psychologue, je n’ai jamais vu de parents baisser les bras »

En tant que psychologue, je n’ai jamais vu de parents baisser les bras, même s’ils imaginent ne pas pouvoir y arriver, même si parfois ils auraient envie de fuir pour ne pas à avoir à vivre ça, même s’ils craignent de craquer et en ressentent de  la culpabilité ; l’énergie qu’ils trouvent en eux pour surmonter cette épreuve est inépuisable. Cette énergie, c’est la décision d’avoir donné la vie et c’est l’amour qu’ils portent à leur enfant. Cette énergie, c’est surtout ce qui fait d’eux des êtres humains,  à la fois forts et fragiles, capables d’affronter une situation que peu de parents imagineraient devoir vivre un jour.

Photo : Liv Bruce

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